Dr Léa Silué est médecin-épidémiologiste à Santé publique France (Cire Ile-de-France) ARS / Île-de-France. C’est l’entité en charge de la gestion du Covid-19 en France. Face à la résurgence du Coronavirus et le début des vaccinations, elle estime qu’on ne peut pas dire que ça va très bien en ce moment dans l’hexagone. « Ces vaccins n’empêchent pas la contamination au virus, mais ils sont efficaces contre les formes graves », affirme Dr Silué. A l’en croire, le problème de la COVID-19, ce sont les formes graves qui nécessitent une hospitalisation et souvent une réanimation… Dans l’entretien elle se prononce également sur l’augmentation du nombre de cas en Côte d’Ivoire.

Quelle est, au quotidien, la tache de Santé publique et particulièrement la vôtre…

Depuis le début de cette épidémie, Santé Publique France consacre, je dirai 80% de son activité à la COVID. C’est pareil pour tous les agents et particulièrement moi. Néanmoins, nous continuons à répondre à d’autres questions de santé publique, auxquelles il faut mener des actions de prévention.

Docteur, on reconfinera ou on ne reconfinera pas en France ?

Il faut retenir qu’on parle de confinement que lorsqu’il y a une tension hospitalière, c’est-à-dire, les hôpitaux sont saturés, et dans le cas de la COVID, lorsque la réanimation est saturée. Dans ce cas, les autorités n’ont pas le choix que de limiter la contamination dont la seule bonne option est le confinement. Dans le cas présent de la France, les indicateurs ne sont pas bons certes, mais pas encore au point de passer à cette mesure stricte. Néanmoins, certains recommandent d’anticiper, mais il ne faut pas oublier l’impact psychologique sur la population. Dans tous les cas, cette décision reste politique.

Le Covid, c’est aujourd’hui des variantes notamment les variantes anglaise et sud-africaine. Première question, est-ce qu’il y a d’autres variantes ?

De nombreuses variantes ont été identifiés depuis l’émergence du Sars-CoV2 mais 3 retiennent actuellement l’attention : le variant du Royaume-Uni, le variant de l’Afrique et le variant du Brésil.

Deuxième question, faut-il vraiment avoir peur de ces variantes ?

Absolument, c’est une autre problématique. Déjà les données des enquêtes épidémiologiques et virologiques britanniques ont indiqué une transmissibilité plus importante de la variante dans le Sud-Est de l’Angleterre, qui aurait progressivement remplacé les autres virus circulants, avec un potentiel estimé d’augmentation du nombre de reproduction (R) de 0,4 ou plus. Ce virus est à plus de 50% plus transmissible que le SRAS-COV2. Rien n’indique toutefois à ce stade que cette nouvelle variante entraîne une augmentation de la gravité de l’infection à un niveau individuel. Néanmoins, l’augmentation de la transmissibilité est susceptible d’entraîner une forte augmentation de l’incidence, avec un pic d’hospitalisations et de décès bien plus élevé.

La variante détectée en Afrique du sud a aussi des résultats préliminaires indiquant que cette variante pourrait également avoir une transmissibilité accrue. Et c’est pareil pour la variante du Brésil.

Concernant les vaccins, combien y en a-t-il aujourd’hui dans le monde ?

Au jour d’aujourd’hui, on est à peu près sept (7) vaccins : Pfizer-BioNTech, Moderna, Astrazeneca, vaccin allemand produit par Bayer CureVac, Johnson & Johnson, le vaccin Russe Spoutnik V et le vaccin Chinois.

Quels sont ceux utilisés en France et dans les pays européens ?

Pour le moment, trois sont validés en Europe et utilisée : Pfizer-BioNTech, Moderna, Astrazeneca.

Le vaccin Oxford- Astrazeneca vient d’être validé le 29 janvier 2021 en Europe, et pourrait bien rebattre les cartes de la lutte contre la Covid-19. Outre-Manche et à très court terme, parce que son déploiement logistique, moins contraignant que celui de ses concurrents, Pfizer-BioNTech et Moderna, viendrait renforcer la couverture vaccinale. Le vaccin d’Oxford doit être conservé à faible température, alors que celui de Pfizer doit être conservé à très basse température (-75 °C) et celui de Moderna à environ – 20 °C. Et à long terme, car ce vaccin sera plus facilement déployé vers les pays à faibles et moyens revenus et ce, d’autant plus qu’il est produit à moindre coût.

Quant au vaccin Russe Spoutnik V fait l’objet de vives critiques pour avoir été mis au point dans la précipitation, et par manque de transparence, le vaccin russe s’avère être efficace à 91,6 % selon une étude publiée dans le Lancet. Il pourrait être validé en Europe.

Croyez-vous que ces vaccins viendront à bout de la maladie ?

C’est notre espoir, mais il reste que la production de ces vaccins soit accélérée afin de vacciner le maximum de personnes et surtout les personnes à risques.

Ces vaccins n’empêchent pas la contamination au virus, mais ils sont efficaces contre les formes graves. Le problème de la COVID-19, ce sont les formes graves qui nécessitent une hospitalisation et souvent une réanimation, et donc souvent une tension à l’hôpital.

Si on agit sur ces formes graves, la COVID, reviendra à une simple gestion de grippe. On pourra donc souffler.

Mais nous sommes inquiets avec l’arrivée des variantes dont on craint une inefficacité des vaccins.

Pour rappel, la recherche sur le traitement est en cours et en bonne voie.

Il y a des gens qui ne croient pas à ces vaccins et craignent même des effets secondaires graves…

Vous savez, nous sommes dans une mondialisation, et donc il y a une transparence sur tout ce qui est produit. Les effets secondaires sont clairement identifiés.

Il y a quand même eu des personnes décédées dans des pays européens après avoir été vaccinées. Qu’en est-il ?

Oui malheureusement, des cas sont signalés en Norvège, en Allemagne et aussi en France.

Mais il faut retenir que la population vaccinée actuellement est très fragile, des personnes de plus de 75 ans avec souvent une perte d’autonomie. En France par exemple, on enregistre souvent 400 à 450 décès par jours chez ces personnes en dehors de la vaccination.

Pour le moment aucun lien n’est formellement établi entre ces décès et la vaccination COVID-19. Mais des recherches sont en cours.

Suivez-vous l’actualité du Covid en Côte d’Ivoire ?

Oui avec beaucoup d’intérêt, j’ai même un groupe de Facebook où nous donnons des informations sur la COVID-19 en Côte d’Ivoire. Ces derniers temps, le nombre de cas augmentent. J’entends des personnes solliciter un confinement dans notre pays, je pense que nous n’en sommes pas là. Il faut juste renforcer les mesures de barrières individuelles et collectives.

Source: Frat’Mat

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